Surmonter le syndrome de l’impostrice
Je l’ai vécu des dizaines, peut-être des centaines de fois. Parfois au beau milieu d’une réunion, je me demande “ bon dieu, mais qu’est-ce que je fiche là ? “ C’est un peu comme si une petite fille qui est en moi se lève soudain et crie “ tu n’as rien à faire ici, ce n’est pas ton monde, personne ne croit en tes salades, tout ça n’est que du vent, de la poudre aux yeux, arrête ton cinéma et reprend ta place ! “
Durant ces instants, je me dit que toute ma vie a été bâtie sur un château de cartes, que tout peut s’envoler à tout instant… Que les gens vont bientôt découvrir le pot aux roses et que je serais exposée à toutes sortes de calomnies.
Je ne suis pas la seule : c’est un sujet que j’ai abordé avec plusieurs personnes, collègues, pairs ou d’autres professionnels de haut profil. Et j’ai remarqué qu’il est encore plus commun chez les femmes qui ont atteint un certain degré de réussite, même si elles ne sont pas les seules à en souffrir.
Le syndrome de l’imposteur a été identifié en 1978 par deux psychologues, Pauline Clance et Susanne Imes. Elles ont effectué une étude auprès de 150 femmes dont la réussite professionnelle était incontestable et reconnue par tout le monde. Chose surprenante, aucune d’entre elles n’a attribué son succès à ses propres compétences, à sa rigueur ou à son travail. Les facteurs principaux de leur réussite étaient, pour elles, la chance, le hasard, un bon réseau de contacts. Elles pensaient toutes qu’elles seraient un jour ou l’autre démasquées, et qu’elles perdraient tout.
Il y a eu beaucoup d’autres études et de choses écrites depuis lors sur ce phénomène, qui peut certes toucher tout le monde mais dont les plus nombreuses victimes sont des femmes qui ont réussi. Car, il faut le reconnaître, ce n’est que récemment que la réussite professionnelle des femmes a été plus ou moins “ acceptée “ par notre société toujours très patriarcale… Et oui, sortir du schéma de la femme au foyer nous ayant pris pas mal de siècles, il est normal que la transition laisse certaines cicatrices, ne croyez-vous pas ? Bon, la bonne nouvelle est qu’il y a des moyens de se sortir de ce tourbillon de culpabilité et de doute !
Comme l’a dit le Dr Tracey Wilen dans son livre Women Lead : Career Perspectives from Workplace Leaders, “ le syndrome de l’imposteur n’est pas une expérience exclusivement féminine, mais les femmes sont plus susceptibles de le vivre. Nous devons nous soutenir et nous encourager mutuellement à reconnaître et à surmonter ces sentiments “. La première chose à faire est donc de reconnaître que nous avons un problème, et d’en parler autour de soi. L’entourage immédiat aura tendance à nier le souci, à le balayer en prenant pour preuve la réussite de la personne. Si cela peut parfois avoir un effet rassurant (cela dépend de la manière dont on le dit), nier le problème n’est pas une solution efficace.
Si vous souffrez du syndrome de l’imposteur, donc, n’essayez pas de le refouler. Dites-vous que c’est un sentiment tout à fait naturel, que beaucoup de personnes ayant connu le succès l’ont ressenti un jour ou l’autre. La deuxième étape consiste à transformer ces pensées négatives en pensées positives : au lieu de vous centrer sur ce que vous ne savez pas, vos échecs ou les choses que vous n’avez pas encore accomplies, concentrez-vous sur vos réussites, vos points forts. Célébrer une réussite, aussi petite soit-elle, est du pain béni pour la confiance en soi ! Si le sentiment persiste, n’hésitez pas à en parler autour de vous. Vous serez étonnés de constater le nombre de gens qui souffrent aussi du syndrome de l’imposteur, c’est fou ! Des amis ou collègues peuvent aussi vous donner une perspective extérieure et vous aider à relativiser les choses.
Personnellement, je me suis résolue il y a quelque temps à faire la liste des choses positives dans ma vie, et celle-ci inclut les petites ou grandes choses que je parviens à accomplir. Tous les matins, je prends quelques minutes pour méditer, et pour me nourrir de pensées positives, et ça marche très bien ! Prendre soin de soi, s’accorder une journée à lire, paresser au soleil, se promener dans la nature, aller à la plage, sont aussi d’excellents remèdes.
Si le mal persiste, il ne faut pas hésiter à consulter : une thérapie peut facilement vous aider à déconstruire cette image négative de vous-même et à aller de l’avant. Certains trouveront peut-être tout ça comique, mais le syndrome de l’imposteur n’est pas une farce : c’est un mal qui ronge en profondeur… Il peut mener la vie dure à n’importe qui, et conduire à des problèmes graves tels que l’anxiété, le stress, la procrastination, le burnout…
Ayez confiance en vous et vos capacités, il suffit parfois de se donner un tout petit coup de pouce pour atteindre les sommets !